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Les stapéliées marocaines

Jean André Audissou nous présente les stapéliées marocaines.

Cet article est originellement paru dans la revue Asklepios n°94, décembre 2005, pages 18-27.

Merci à Jean André Audissou et à Asklepios pour leur autorisation de publication sur le Cactus Francophone.

Cet article est disponible en anglais au format PDF :

Morrocan Stapeliads


Il y a une vingtaine d'années, mon père m'offrit toute la collection de l'ancienne revue francophone “Cactus”. En parcourant les nombreux articles de cette revue, je suis tombé sur un article de 1956 parlant de Caralluma hesperidum Maire. A l'époque, je ne connaissais pas grand chose aux Asclépiadacées, et cet article a éveillé en moi une grande curiosité pour cette famille de plantes. Je vivais au Maroc à ce moment là. Apprenant que cette plante poussait dans ce pays, j'ai décidé de la chercher. Ce qui, au départ, n' était qu'un simple intérêt pour les Asclépiadacées devait devenir une véritable passion.

Le Maroc est très pauvre en plantes succulentes. Une des raisons évoquées par les climatologues pour expliquer ce phénomène est l'évolution trop rapide du climat au cours des derniers millénaires. En effet, le climat tropical humide qui régnait encore récemment ( à l'échelle géologique ) sur l'Afrique du Nord et le Sahara s'est transformé rapidement en climat aride ou semi-aride, ne laissant pas aux plantes le temps d'évoluer vers la succulence. Malgré tout, cinq Stapéliées ont été dénombrées à ce jour :

  • Orbea decaisneana (Lemaire) Bruyns,
  • Caralluma burchardii ssp. maura Maire,
  • Caralluma europaea var. europaea Gussone,
  • Caralluma joannis Maire,
  • Caralluma munbyana (Decaisne) N. E. Brown.


Orbea decaisneana (Lemaire) Bruyns. (Caralluma hesperidum Maire)

Orbea decaisneana

Orbea decaisneana JAA 211 Gorges Massa, Oumahrouz.



Parmi ces 5 espèces marocaines, c'est la seule qui peut être séparée des 4 autres par les caractères de l'appareil végétatif. La tige est en effet cylindrique, munie de protubérances coniques. Pour les 4 autres, les tiges sont quadrangulaires à angles plus ou moins sinués et ne sont donc identifiables qu'au moment de la floraison.

Orbea decaisneana se rencontre dans le Sud Marocain, le long du littoral de Essaouira à Sidi Ifni et jusqu'à 150 km à l'intérieur des terres (Aoulouz). Une station aurait été découverte dans le Rif Oriental par Font-Quer en 1929. Il s'agirait d'une station relictuelle. Cette plante est souvent associée à Argania spinosa (Sapotaceae), Senecio anteuphorbium, Warionia saharae, (Asteraceae) et Acacia gumifera (Mimosaceae) . Elle aime l'humidité du littoral où elle peut être localement abondante. O. decaisneana n'est pas difficile à trouver car elle pousse souvent à découvert. Etant vénéneuse, elle ne souffre pas du surpâturage. Cette espèce est la plus courante dans nos collections car elle est de culture facile.


Orbea decaisneana, Mirleft, S. of Agadir. Orbea decaisneana avec Euphorbia echinus, Oued Ouarksiz, S. of Sidi Ifni.
Orbea decaisneana Orbea decaisneana Orbea decaisneana

Caralluma burchardii ssp. maura Maire

Caralluma burchardii

Caralluma burchardii en culture.


C. burchardii est présente dans l'archipel des Canaries. C. burchardii ssp. maura se distingue de la précédente par des fleurs pédicellées et plus petites. L'espèce se rencontre sur le littoral atlantique du nord d'Agadir jusqu'à l'Oued Noun. La végétation associée est composée principalement de Euphorbia echinus (Sud d'Agadir), E. officinarum (Nord d'Agadir), E. lamarckii, Argania spinosa, et Kleinia anteuphorbium.

Contrairement à Orbea decaisneana qui est vénéneux, C. burchardii ssp. maura est non seulement apprécié des chèvres et des moutons, mais également par les tribus berbères qui mangent les jeunes pousses. C'est une plante plus difficile à trouver dans la nature. Il faut la chercher dans les buissons d'épineux ou dans les touffes d'Euphorbia echinus. Les graines qui tombent dans ces redoutables touffes épineuses peuvent ainsi germer à l'abri des prédateurs.

C. burchardii ssp. maura a également la faculté d'émettre des tiges souterraines qui sortent de terre à la saison des pluies. Seules celles qui sortent au milieu d'une touffe végétale bardée d'épines ont quelques chances de survie. La culture de cette plante ne semble pas poser de problème particulier.

Caralluma burchardii ssp. maura & Euphorbia echinus Mirleft, S. d'Agadir. Caralluma burchardii Kalanchoe laciniata ssp. faustii Oued Ouarksiz S. Sidi Ifni Maroc.
Caralluma burchardii Caralluma burchardii

Caralluma europaea var. europaea Gussone

Caralluma europea var. europea

Caralluma europaea JAA 197 en culture. W. Tafraout Maroc


L'aire de répartition de cette plante est vaste. On la trouve du Maroc jusqu'en Israël ainsi qu'en Espagne et sur l'île de Lampedusa où elle fut découverte en premier par Gussone en 1832. Au Maroc, on la rencontre sur les mêmes biotopes que Caralluma burchardii ssp. maura mais aussi dans l'intérieur du pays, dans l'Anti-Atlas, le Moyen-Atlas et le Rif. Cette Asclepiadaceae, à tiges à section carrée et aux angles sinués ondulés, ne peut pas être différenciée de C. burchardii var. maura sur le terrain. Seuls les caractères floraux permettent de le faire. Les fleurs sont très variables, particulièrement au Maroc. La taille de la corolle peut varier de 0.7 à 2 cm de diamètre, les poils sont plus ou moins denses. L'ornementation peut aller d'une corolle de couleur uniforme ou tigrée. Ce polymorphisme floral montre les nombreuses variations individuelles ou stationnelles rencontrées et explique la raison pour laquelle Maire avait décrit de nombreuses variétés dans les années 30.

J'ai eu l'occasion de visiter plusieurs stations, en particulier celle de Tafraout dans l'Anti-Atlas dont l'indication m'avait été donnée très aimablement par Bert Jonkers en 1997. Les fleurs de cette population sont particulièrement grandes (1,7 cm de diamètre) et belles. J'ai également prospecté la forêt d'Admine, au sud d'Agadir, en vain. La construction récente d'un aéroport international ainsi que l'extension de l'agriculture ont nettement dégradé cette forêt qui ne protège plus la ville d'Agadir contre les vents de sable venus du Sahara.
La station d'Aoulouz, au pied du Haut-Atlas dans la vallée du Souss, est particulièrement intéressante car on y rencontre 3 des 5 Asclépiadacées qui nous intéressent : Caralluma europaea var. europaea, C. joannis et Orbea decaisneana.
Bien que cette plante ait une large aire de répartition, c'est une plante très localisée et difficile à trouver. Sa culture n'a pas d'exigence particulière.

Caralluma europaea, W. Tafraout Maroc Caralluma europaea, Bert Jonkers 217, Aoulouz Maroc Caralluma europaea, Rif Maroc
Caralluma europaea Caralluma europaea Caralluma europaea

Caralluma joannis Maire

Caralluma joannis

Caralluma joannis, Aoulouz Maroc


Cette espèce endémique a été découverte en 1933 et décrite par Maire en 1940. La station d'Aoulouz semble être la seule connue à ce jour.
C. joannis est une plante de grande taille dont les tiges tétragones peuvent atteindre 1 m de long.. Les inflorescences sont subterminales, formées de 2 à 10 fleurs, à odeur très désagréable. Cette espèce rupicole pousse sur des falaises verticales et a un port pendant.

Le développement des stolons en culture pourrait être la démonstration que C. joannis poussait (il y a sans doute fort longtemps) sur des surfaces moins verticales et plus meubles, à une époque où le surpâturage était moins dévastateur. En effet, les plantes qui croissent dans les crevasses des falaises ne présentent guère de stolons. On assisterait alors aux derniers vestiges préservés de cette espèce remarquable (sans doute beaucoup moins répandue à l'origine que C. europaea) plutôt qu'à une adaptation à une niche écologique particulière. C'est sans aucun doute une espèce facile à cultiver.

Caralluma joannis, Aoulouz Caralluma joannis JAA 207 en culture
Caralluma joannis Caralluma joannis Caralluma joannis

Caralluma munbyana (Decne.) N.E.Br.

Cette espèce est rencontrée en Espagne et en Algérie. Au Maroc, elle pousse dans l'extrême Nord-Est du pays, dans la région d'Oujda. N'ayant pas pu me rendre dans cette station, je l'ai cherchée pendant l'hiver 2000/ 2001 en Espagne où je l'ai trouvé dans la Province de Murcie.

C'est une plante difficile à trouver car elle se cache dans les touffes de Stipa sp.. En cette période de l'année, la température était assez basse et le sol détrempé par des pluies fréquentes. On pourrait donc penser qu'une plante poussant dans de telles conditions est tolérante en culture. En fait, j'ai trouvé que c'était la moins facile à cultiver parmi celles mentionnées dans cet article.

Les fleurs de C. munbyana sont très différentes de celles des autres espèces de ce genre. Le tube est très court et les lobes sont linéaires-allongés.


Caralluma munbyana JAA 224, Hellin, Espagne Caralluma munbyana JAA 224, Hellin, Espagne. En culture
Caralluma munbyana Caralluma munbyana

Caralluma mouretti Chevalier = C. edulis Bentham & Hooker

Sa présence au Maroc demande de futures investigations pour être confirmée. En 1997, DC. Plowes me demanda de contacter un de ses correspondants en Mauritanie pour relancer les recherches de cette plante. Il semblerait que là-bas aussi, elle n'ait pas été rencontrée depuis longtemps.

Caralluma joannis, Aoulouz Tafraout, Anti Atlas, Maroc
Caralluma joannis Caralluma joannis Caralluma joannis

BIBLIOGRAPHIE

  • Audissou J-A. (1994) : Redécouverte de Caralluma joannis Maire. Cactus Aventures, 23 : 19-21
  • Audissou J-A. (1996) : In Situ : notes complémentaires sur Caralluma joannis Maire, Cactus Aventures, 29 : 20-21
  • Audissou J-A., Delanoy G. & Manetti M. (1998) : Caralluma joannis en culture. Succulentes 1 : 3-8
  • Berthet P. (1987) : A la découverte des Caralluma d'Espagne, Succulentes 2 : 3-5
  • Albers F. & Meve U. (2002) : Asclepiadaceae. Illustrated Handbook of Succulent Plants 46-63, 191
  • Jonkers B. & Walker C.C. (1993) : The Asclepiads in Morocco. A short commentary. Asklepios, 59 : 14-21
  • Maire R. (1940) : Caralluma joannis Maire, n. sp. Bull. Nat. Afr. Nord, 31 : 27-28
  • Marnier-Lapostolle J. (1956) : Les Stapéliées. Cactus, 52 : 127.
  • Raynaud (1988) : Thèse Univ. Montpellier : 199-235
  • White A. & Sloane B.L. (1937) : The Stapeliae (ed.2), Abbey San Encino Press, vol. 1 : 1-407


Par Jean André Audissou
Publié le : 2010/12/26

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