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Raid Chili Pépère

Guanillos - Taltal

Copiapoa longistaminea Dire que j'ai dormi d'un sommeil de bébé serait un gros mensonge. Le sol est dur, le sac de couchage étroit, la couverture de survie fait un bruit épouvantable, mais je me suis réveillé de bien meilleure humeur que certains jours de semaine lorsque je suis en France. Ce n'est pas tous les jours, qu'en ouvrant les yeux, la première chose qu'on voit, c'est une touffe de Copiapoa longistaminea dans un décor de désert d'Atacama et avec la rumeur du pacifique comme fond sonore.
Dès qu'il y eût assez de lumière, je fûs debout. Le site était splendide, l'océan d'un coté, le terrain montant en pente douce vers les montagnes à l'est. Le ciel était bleu, pour une fois, et les roches étaient composées d'un mélange de granit et de pierre marron orangé dont le soleil levant accentuait la couleur. Et au milieu de tout ça, des touffes de Copiapoa longistaminea, un des plus beaux sinon LE plus beau des Copiapoa. Les touffes les plus imposantes comptent une cinquantaine de têtes dont les plus grosses font entre 15 et 20 cm de diamètre, l'épiderme est vert pruiné, l'apex recouvert d'une laine orangée est entouré d'une couronne d'épines dressées marron rouge, devenant rapidement noires sur le reste du corps de la plante. Il y a des plantes de toutes les tailles, certaines pas plus grosses qu'une pièce d'un euro.

Chacun vaque à ses occupations, les uns explorant les alentours, un autre en décrassant la voiture à l'eau du Pacifique, un autre en se faisant un café sur un feu de brindilles et Copiapoa morts. L'endroit n'est pas si idyllique que ça. Entre les rochers, nous trouvons des tas de tests d'oursins laissés par des pêcheurs. Ce ne sont pas les oursins les plus dérangeants à l'œil, mais les cartons, bouteilles vides et autres espadrilles abandonnés tout autour. Nous nous sentons obligés de faire un peu de ménage en brûlant ce qui peut l'être, le reste est casé dans nos poubelles.
oxalis gigantea Au moment du départ, nous avons une mauvaise surprise. Le pick up refuse de démarrer, la batterie étant à plat. Le dîner aux veilleuses lui a été fatal. Heureusement la piste descend à cet endroit, un démarrage en seconde devrait pouvoir nous sauver. Mais non, la voiture arrive en bas, le moteur toujours à l'arrêt. Comme par enchantement des câbles sortent du coffre de la voiture de Marcel, un petit raccord entre les 2 et le pick up redémarre. Ouf ! Le garage le plus proche doit être à plus de 100km. Merci Marcel !

Nous revenons vers la Quebrada Guanillos où nous sommes passés hier à la tombée de la nuit. Lorsque le GPS nous donne la bonne position nous garons les voitures sur le coté de la piste (A45). Pas moyens de se garer ailleurs de toute façon. Nous sommes censés trouver ici, au même endroit 4 espèces différentes de Copiapoa. La première ne nous a pas quittés depuis la plage, toujours aussi splendide, Copiapoa longistaminea. La deuxième est une ancienne connaissance, Copiapoa grandiflora, déjà vu la veille. Il forme des touffes de quelques têtes, larges d'une quinzaine de cm, vert clair et aux épines fines et noires. Ces 2 premiers sont visibles au premier coup d'œil.


La prière de Georges Reste les 2 autres à découvrir : Copiapoa angustiflora (nous l'appelions à ce moment là C. esmeraldana) et surtout Copiapoa laui. Ces 2 espèces sont très difficiles à trouver car, comme disent les botanistes, elles sont cryptiques et mimétiques. Elles se cachent dans le sol et en ont la couleur. C'est donc sans illusions que nous nous sommes éparpillés sur le flanc sud de la colline. En moins de 5 minutes, notre œil de lynx, j'ai nommé Patrick, nous appelle en nous prévenant qu'il y a là des choses qui ressemblent à des crottes de chèvres mais qui n'en sont pas. Il s'agit bel et bien de Copiapoa laui, dont les minuscules têtes laineuses de la taille d'un petit pois affleurent à peine du sol. Une fois notre œil habitué, nous en découvrons d'autres, des centaines, des milliers, en fait, nous y marchons dessus tellement il y en a. Mais attention aux apparences, il n'y a pas autant de plante que ça, d'abord parce que C. laui a un territoire extrêmement restreint (il n'y en a que dans le bas de cette vallée et de celle un peu plus au sud) et surtout chaque tête n'est pas une plante. Enfoncée dans le sol, il y a une énorme racine qui produit des centaines de tiges qui remontent à la surface. Inutile de dire que c'est une espèce en grand danger.

Copiapoa laui Copiapoa laui fût découvert à la fin des années 70 par le Pasteur Alfred Lau. Il a d'abord cru qu'il s'agissait de ce qu'on appelle maintenant un Eriosyce, du groupe Thelocephala, comme E. kraussi, napina ou odieri. Ce n'est que lorsque les quelques spécimens qu'il avait récoltés ont fleuri dans sa serre qu'il s'est rendu compte de son erreur. La description date de 1980.

La curiosité me poussa à redescendre vers la piste, la traverser et explorer l'autre versant. Celui exposé auCopiapoa angustiflora Nord. Mon œil fût rapidement attiré par de petites plantes dépassant à peine du sol, plus grosses que C. laui, elles faisaient jusqu'à 3 cm de diamètre. De couleur marron, elles portaient de fines épines noires d'environ 1cm. Voici donc l'énigmatique Copiapoa sp. Guanillos. Bien qu'appelé C. esmeraldana pendant des années, cette plante diffère de l'espèce décrite par Ritter par nombre de détails, dont les fleurs. Après quelques années passées dans les limbes de la taxonomie sous le nom de Copiapoa sp. Guanillos, on lui a attribué enfin un nom en décembre 2006 : Copiapoa angustiflora. Hybride entre C. laui et C. grandiflora pour certains, espèce à part entière pour d'autres, quel que soit son statut, elle est à nos pieds, recouvrant le versant nord de la vallée. De nombreuses plantes sont en bouton ou en fleur, donnant l'impression que c'est le gravier qui fleurit. Assez bizarrement, il n'y a aucun Copiapoa laui de ce coté, il faut arriver au sommet du talus et passer du coté sud pour les voir réapparaître… et voir disparaître les C. angustiflora. On trouve aussi sur ce site des Eulychnia saint-pieana, des Deuterocohnia chrysantha et des Oxalis gigantea, rien que de très banal…

Isla guanillos
Cela fait déjà une heure que nous sommes sur ce site, il est temps d'aller voir ailleurs. L'idée était de rejoindre la Quebrada Tigrillo, la vallée au nord de Guanillos. N'ayant pas d'indication très précise sur le chemin à prendre pour y accéder, nous tentons de passer par la plage. Nous faisons donc demi-tour, mais ce chemin s'avère être un cul de sac, des rochers imposants nous barrent la route. Pour accéder à la Quebrada Tigrillo, il nous aurait fallu remonter la Quebrada Guanillos et prendre une vallée transversale vers le nord. Nous le saurons pour la prochaine fois. Mais les superbes C. longistaminea justifient à eux seul un arrêt (A46). Tellement superbes qu'ils excitent les convoitises. Nous avons trouvé quelques plantes arrachées et abandonnées là. Nous avons de cet arrêt une vue sur Islas Guanillos, un groupe d'îlots à 600 mètres au large. Ces îlots sont blancs comme de la craie. Au détail près que ce n'est pas de la craie, mais du guano, d'où le nom.

Copiapoa columna-alba Il est déjà 11h, si nous voulons être à Taltal ce soir, il ne faut pas perdre de temps. Nous rebroussons chemin et repassons une 3ème fois par la Quebrada Guanillos, et quelques kilomètres après le site des C. laui, nous tombons en arrêt devant un paysage de rêve pour un copiapoaphile (A47). Des collines basses nous entourent, et à perte de vue des milliers de C. columna-alba semblent au garde à vous avec leur air de Tour de Pise. Ceux ci sont beaucoup plus épineux que ceux de Pan de Azucar, et se rapprochent donc de la forme melanohystrix vue en descendant de Las Lomitas, qui n'est pas si loin. En plus des éternels Eulychnia, il y a quelques spécimens de Trichocereus deserticola, une plante particulièrement agressive avec des épines de dix bons centimètres de long, épaisses, marrons sur les nouvelles pousses et grises sur les anciennes. Elle forme une touffe de quelques tiges de 1m à 1m50 de haut. Nous avons vu cette espèce depuis Huasco jusqu'au nord de Paposo.

La route vers Cifuncho Nous reprenons la route et roulons 1h30 sans nous arrêter, une de nos plus longues étapes. Il fallut remonter la Quebrada Guanillos jusqu'à la Ruta 5, puis remonter vers le nord jusqu'à la bifurcation vers Taltal et enfin redescendre vers le Sud en direction de Cifuncho. Luxe suprême, la route est bitumée ! Nous traversons une plaine désertique, rouge. Le ciel est à peine voilé par quelques nuages d'altitude et le soleil tape dur. Lorsque nous voyons des cactus sur une colline au bord de la route, nous nous arrêtons quelques minutes pour les admirer (A48). Ce sont des plantes intermédiaires entre C. cinerea ssp. cinerea et C. cinerea ssp. columna-alba. La plupart sont colonnaires et solitaires mais quelques-unes unes rejettent. Elles sont droites et non penchées. La spination fait penser à des C. melanohystrix, mais certaines plantes ont des épines grises et non noires. L'aire de répartition de C. columna-alba est beaucoup plus au sud alors que nous sommes tout proches des sites à C. cinerea.

Quebrada Zaniones Quelques kilomètres plus loin nous sortons de la route goudronnée et entrons dans la Quebrada Zaniones en prenant une piste poussiéreuse et caillouteuse, récemment élargie qui prend la direction de l'océan. Un arrêt est le bienvenu, il est 14h, l'heure de casser la croûte (A49). Le côté gauche de la piste (vers le sud) est plat et de couleur ocre, on y trouve quelques Copiapoa cinerea/columna-alba, identique à ceux de l'arrêt précédent. Le côté droit est en pente et de couleur rouge, le contraste est surprenant. En plus de quelques rares Copiapoa cinerea, il y a surtout des touffes terriblement épineuses de Copiapoa desertorum. Ces touffes de plusieurs centaines de têtes font jusqu'à 1m40 de diamètre pour 80 cm de haut. Les plantes semblent terriblement déshydratées, c'est à peine si on voit l'épiderme vert à travers la couche dense d'épines. Il y a quelques rares fruits mais aucun bouton, aucune fleur. On ne pourra donc pas confirmer l'observation de Paul Klaassen qui en visitant le site en 2004 a trouvé des plantes à fleurs rouges. Est-ce là, la forme rubriflora ?

Cifuncho De retour sur la route goudronnée, il nous reste quelques kilomètres à parcourir pour atteindre Cifuncho, un petit village au bord de l'océan. Nous allons d'abord vers le nord de la baie. Une piste nous fait faire 1 kilomètre ou 2 mais ne va pas plus loin (A50). Ce n'est pas la peine, nous trouvons dans les rochers qui surplombent la mer quelques spécimens de C. rupestris, plus petits et, semble t-il, moins déshydratés que ceux de Zaniones, mais guère différents.

C. rupestris, desertorum, rubriflora, il n'est pas aisé de s'y retrouver dans la multitude de noms et de mises en synonymie de ces taxons là.
C. rupestris à l'origine désignait les plantes poussant sur la côte, au nord de Cifuncho. Ont été classé sous ce nom, les plantes poussant dans le haut de la Quebrada San Ramon, au nord est de Taltal.
Copiapoa aphanes, récemment décrit, se trouve aussi dans la région. La localisation exacte est gardée confidentielle par les auteurs, mais il doit s'agir d'une forme d'altitude du Copiapoa rupestris poussant dans la Quebrada San Ramon.
C. desertorum sont les plantes trouvées dans la Quebrada Zaniones et ne sont sûrement qu'une forme poussant à l'intérieur des terres de C. rupestris. C. rubriflora qui ne sont que des C. rupestris à fleur teintée de rouge, ne méritant pas un statut d'espèce.
Copiapoa taltalensis se trouve au nord est d'Esmeralda, vers la Quebrada Tigrillo, Ritter lui a donné le nom de Copiapoa hornilloensis. Certains auteurs avaient fait de C. taltalensis une variété de C. humilis. Ce qui s'est avéré par la suite une erreur lorsque les descriptions et les plantes types ont été bien étudiées.
Tous ces taxons sont maintenant synonymes de C. taltalensis selon The New Cactus Lexicon.

Le terrain de foot Nous avions pour consigne de trouver un terrain de foot et d'y rechercher une géophyte endémique à la baie de Cifuncho, Eriosyce kraussi ssp. weisseri. Cette plante assez peu connue, ressemble à E. esmeraldana mais avec un épiderme plus brillant, plus clair et complètement lisse. Autre différence avec E. esmeraldana, il est extrêmement difficile à cultiver, la moindre erreur d'arrosage est fatale. Et je comprends maintenant pourquoi en regardant l'endroit où cette plante est censée pousser. C'est véritablement un désert. Il n'y a rien. Pas un Eulychnia, pas un seul buisson desséché, tout est minéral. Mais que c'est beau ! L'océan bleu, le ciel bleu, les montagnes pelées dans le fond, la plage en arc de cercle de couleur ocre rehaussée par le soleil baissant sur l'horizon, ça donne soif, mais c'est beau !
Reste à trouver ce terrain de foot. Il n'est pas au nord de la baie, allons donc au sud, du coté du village. Il est bien là. Terrain de foot c'est un bien grand mot, c'est un espace plan avec des buts à chaque extrémité. Le temps de garer les voitures (A51), et tout le monde le regard tourné vers ses pieds arpente les abords du terrain. En vain. On ne voit rien.

Copiapoa sp. Cifuncho Heureusement, il y a d'autres choses à voir. Il faut pour cela grimper sur les pentes raides de la colline qui nous séparent de l'océan. Mais l'exercice est payant, on a vite fait de trouver des Eriosyce rodentiophila, comme toujours en petit nombre, comme toujours accrochés aux rochers, on pourrait d'ailleurs se demander si ces plantes n'ont pas des ventouses à la place des racines. Il y aussi un Copiapoa, lui aussi en petit nombre. Il est nommé Copiapoa sp. Cifuncho, il s'agit très probablement de la population la plus septentrionale de C. longistaminea, il en a d'ailleurs toutes les caractéristiques, il est juste un peu plus petit et plus épineux que ceux vus le matin.
Il n'est pas encore 17h quand nous prenons le chemin de Taltal, une petite ville où nous allons passer les 2 prochaines nuits. Taltal est un port qui a connu son heure de gloire dans la 2ème moitié du 19ème siècle avec l'exportation du salpêtre. Au début du 20ème siècle, Taltal comptait 30 000 habitants, un opéra, des consulats et même une ligne de chemin de fer de 150 km construite… pour transporter le salpêtre ! Mais dans les années 30 le marché de ce minerai s'effondre face à la concurrence des nitrates de synthèse. En 1954 la ligne de chemin de fer est vendue à un particulier pour être totalement démantelée en 1970 alors que la population avoisinait les 6000 habitants. Aujourd'hui Taltal en compte 14 000, n'a plus de port mais garde quelques vestiges de ce passé.

Nous savons qu'il y a des cabanas dans le nord de Taltal où nous pourrons loger. En entrant dans la ville, nous voyons des pancartes indiquant les “cabanas Caleta Hueso” sur la route de Paposo ce qui est bien dans le nord de la ville. Le temps de faire le plein d'essence, nous prenons la direction de Paposo. Ce n'est pas bien difficile de s'orienter même sans signalisation, l'océan est en face, donc le nord est à droite et comme les rues sont pour la plupart rectilignes, nous trouvons sans difficulté. Grabowskia glauca Les Cabanas Caleta Hueso sont une étape de choix pour les cactophiles. Elles sont installées sur un petit cap s'avançant sur le Pacifique, abritées du vent du large par une petite colline. Le propriétaire est un amateur de plantes et a installé autours des bungalows un mini jardin botanique. On trouve là toutes sortes de cactus dont beaucoup de Copiapoa. Mais aussi des arbustes endémiques à la région comme ce Grabowskia glauca, une solanacée arbustive locale. C 'est ici que nous avons vu les seuls Oxalis gigantea en feuille parce qu'arrosés.

Le temps de déposer nos affaires et de nous doucher (enfin !!!) et nous voilà repartis dans Taltal. Nous trouvons une petite supérette moderne qui nous offre un choix toujours aussi restreint en conserves diverses, mais suffisamment pour le pique-nique de lendemain midi. Puis nous nous baladons dans les rues de Taltal à la recherche d'un restaurant que nous trouvons sur le bord de mer au sud de la ville, vide évidemment comme tous les restaurants de ces petites villes chiliennes. La patronne nous accueille avec beaucoup de gentillesse et de patience face à notre lenteur à commander et à toutes nos questions sur les plats, pourtant peu nombreux. Questions inutiles parce que de toute façon nous mangerons exactement la même chose que les jours précédents : du poisson ou une viande grillée avec du riz…. Pescado o carne con arroz.


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