La reproduction sexuée des Euphorbes
Le genre Euphorbia
Le genre Euphorbia, de la famille des Euphorbiaceae, contient plus de 2000 espèces et est l'un des groupes de plantes à fleurs les plus diversifiés sur Terre. Le genre se caractérise par des inflorescences particulières nommées cyathes. Les Euphorbes produisent toutes un latex blanc qui coule quand on les coupe et cette sève laiteuse est plus ou moins toxique ou irritante selon les espèces. Il y a de nombreuses euphorbes herbacées à travers le monde, en particulier dans les zones tempérées, mais le genre est également connu pour ses nombreuses espèces de plantes dites succulentes, dont certaines ressemblent fortement aux cactus.
Les euphorbes succulentes sont présentes dans les zones tropicales à subtropicales et sont représentées sur les cinq continents mais c'est dans le sud et l'est de l'Afrique (Angola, Namibie, Afrique du sud, Mozambique, Tanzanie, Kenya, Somalie, Éthiopie, Soudan…), ainsi qu'à Madagascar qu'elles se sont le plus diversifiées.
Les cyathes
Le genre est caractérisé par ses cyathes ou cyathium (du grec kuathos = coupe), nom donné à l'inflorescence partielle des euphorbes en forme de coupelle, dans laquelle se situent les fleurs femelles et mâles.
Toutes les fleurs des euphorbiacées sont unisexuées (soit mâles, soit femelles seulement) et souvent de très petite taille. Chez les euphorbes, les fleurs sont encore plus réduites et ce à leur plus simple expression. Un simple pistil pour la fleur femelle et une étamine pour la fleur mâle. Ces fleurs sont regroupées en une inflorescence dénommée cyathe. Cette organisation est présente chez toutes les espèces du genre, mais nulle part ailleurs dans le règne végétal. Alors que la plupart des autres grands genres de plantes diffèrent dans les caractéristiques des fleurs elles-mêmes, chez les euphorbes la variation s'exprime plutôt dans les caractéristiques du cyathe, qui peut montrer une variabilité étonnante d'un groupe à l'autre au sein du genre.
Ex: E. globosa, E.antso, E.itremensis, E.woodii, E.copiapina…
Les cyathes sont rarement solitaires, mais la plupart du temps réunis en cymes (simulant une ombelle).
Un cyathe se compose :
- d'un involucre.
- de cinq glandes nectarifères qui sont parfois fusionnées.
- d'une fleur femelle, se tenant au centre et réduite à 3 carpelles soudés entre eux et portés par un pédicelle.
- de cinq groupes de fleurs mâles entourant la fleur femelle. Les fleurs mâles sont réduites à de simples étamines.
- Parfois le cyathe est entouré et protégé par deux bractées (fausses feuilles) colorées nommées cyathophylles.
1- Incyathescence
2- Le cyathe
3- Coupe longitudinale du cyathe
La pollinisation
Les explications sur la pollinisation des euphorbes sont le fruit d'observations personnelles faites à partir de mes plantes en collection et plus particulièrement les euphorbes de Madagascar, mais le principe reste le même pour toutes les autres.
Dans la nature, la pollinisation des euphorbes est effectuée par le vent (anémophilie) ou par les insectes (entomophilie).
Pour la réussir manuellement, auto-fertiles ou pas, il est important de savoir que la plupart des espèces sont dichogames (dont les fleurs mâles et femelles ne se développent pas en même temps) on parle aussi d'hermaphrodisme successif.
Le plus souvent l'acquisition des caractères sexuels non simultanée se fait dans l'ordre suivant : fleurs femelles puis fleurs mâles, on parle alors de protogynie. Ce qui rend l'autogamie (ou autofécondation) plus difficile.
Ex : E. cylindrifolia, E. pachypodioides, E. milii v tenuispina, E. capsaintemariensis, E. moratii…
Si, au contraire, ce sont les fleurs mâles qui sont matures avant les femelles, on parle alors de protandrie.
Ex : E. hedyotoïdes.
Il y a aussi quelques cas de dioécie.1)
Ex : E. mahabobokensis, E. denisii …
Matériel à utiliser pour une pollinisation manuelle :
Un pinceau de type n°2 auquel il faut couper de moitié la touffe de poils de façon à avoir une surface plane et ainsi une meilleure accroche pour prélever le pollen.
1er jour
Les cyathes s'ouvrent, les cyathophylles s'évasent doucement et laissent apparaître le pistil (fleur femelle). Les stigmates ne sont pas encore à maturité.
3ème-4ème jour (+/-)
Les glandes nectarifères (parties jaunes) commencent à secréter un nectar.
Là, les stigmates sont à maturité et peuvent recevoir du pollen de la même plante ou d'un autre individu ou encore celui d'une autre espèce.
En l'absence d'étamines, c'est le moment idéal pour la pollinisation
5ème-6ème jours (+/-)
Les premières étamines apparaissent enfin tandis que les sacs polliniques s'ouvrent au fil de la journée, la fleur femelle, y compris l’ovaire, fane inévitablement si il n'y a pas eu de pollinisation.
En tenant compte de ces différents stades, il devient alors relativement facile de faire fructifier une euphorbe.
Quelques cas de figure possibles :
- Pour les espèce auto-fertiles, une seule plante peut suffire à condition d'avoir une plante plus ou moins ramifiée et ainsi plusieurs cyathes au même moment mais à des stades différents, soit des cyathes du 3ème-4ème jour avec des stigmates matures et d'autres cyathes du 5ème-6ème jour avec des étamines mûres. Ex : E. moratii, E. cremersii, E. razafindratsirae…
- Pour les espèces auto-stériles, deux individus génétiquement différents sont nécessaires et le principe de pollinisation reste le même. Ex : E. millotii
- Pour les espèces dioïques, deux plantes sont indispensables, un plant femelle et un plant mâle. Dans ce cas, en général, les plantes fleurissent plus ou moins à la même période. Ex : E. bongolavensis, E. mahabobokensis, E. denisii…
Quelque soit le cas, mieux vaut avoir au minimum deux plantes de chaque espèce afin de les reproduire par graines.
Si la pollinisation a été faite au bon moment, les fruits se développent sur une période de 3 à 4 semaines avant d'arriver à maturité.
Les fruits
Les fruits des euphorbes sont pratiquement tous à trois loges (tri-coques), contenant chacune une graine, dont la déhiscence est explosive (les graines sont éjectées, parfois à plusieurs mètres).
Là encore, quelques exceptions comme par exemple E. denisii qui est dicoque (2 graines) et dont l'ouverture n'est pas explosive.
Que faire pour éviter de perdre les graines ?
- certains utilisent de la colle à bois, une goutte sur le(s) fruit(s).
- d'autres fabriquent des petits sacs puis ensachent le(s) fruit(s).2)
- d'autres encore laissent faire en espérant que ça tombe dans des pots voisins
…
Personnellement, une fois le fruit bien développé (3-4 semaines), je pique régulièrement le tégument et lorsqu'il n'y a pas de latex qui s'écoule, je considère que le fruit est mûr.
Ou encore, pour les espèces aux cyathes pendants (ex: E. cremersii), une fois le fruit à maturité le cyathe se dresse de façon à expulser les graines. Là, je n'ai plus qu'à cueillir les fruits avant expulsion.
Auteur : Sébastien Houyelle
Publié le : 2012/11/09
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